À Bobigny, Gisèle Halimi défend l’avortement. En 1976, c’est à la peine de mort que Paul Lombard s’attaque, en voulant éviter la peine capitale à Christian Ranucci. À Clichy-sous-Bois, Jean- Pierre Mignard défend les familles de Zyed Benna et Bouna Traoré, électrocutés dans un poste électrique pour avoir tenté d’échapper à un contrôle de police. En 2006, l’acte infanticide de Véronique Courjault lève le tabou du déni de grossesse. À Bordeaux, le procès de Maurice Papon revisite les heures sombres de l’Histoire de France. Le 26 janvier, à l’Opéra de Vichy, Richard Berry nous fait revivre ces grands procès qui révèlent des faits de société majeurs ayant marqué l’histoire judiciaire de ces quarante dernières années. Entretien.
Ce sont des affaires qui ont fait évoluer des lois et les mentalités. Sans Gisèle Halimi, Simone Veil n’aurait jamais fait passer la loi pour la dépénalisation de l’IVG. C’est l’avocate, la militante de la première heure en mettant l’avortement au cœur du débat. Dans l’affaire Christian Ranucci, c’est la peine de mort qui a secoué l’opinion publique. Ranucci a été exécuté mais cette plaidoirie a laissé énormément de doutes quant à sa culpabilité. Quelques mois plus tard, Badinter va réussir à sauver la tête de Patrick Henry, bien qu’il soit coupable. Et, par la suite, c’est en tant que Garde des Sceaux, qu’il fait abolir la peine de mort. Autre affaire, celle de Véronique Courjault. Avant la plaidoirie d’Henri Leclerc, on n’avait jamais entendu parler du déni de grossesse. Avec l’affaire Zyed et Bouna, on est devant un énorme fait de société. Elle est à l’origine du soulèvement des banlieues et des émeutes de 2005 qui ont raisonné partout en Europe. Toutes ces affaires sont extrêmement emblématiques et universelles dans le sens où elles parlent à toutes les classes de la société.
La robe d’avocat a cette vertu de faire disparaître toutes les apparences sociales mais elle a aussi l’intérêt de «désexualiser». En mettant la robe, je deviens Gisèle Halimi. Et puis, je suis le père de trois filles, toute ma vie je me suis retrouvé au cœur des droits des femmes. Je vois bien, à travers elles, ce que vivent les femmes, ce que subissent les filles. Ce n’est donc pas cette plaidoirie qui m’a alerté mais ça m’a donné encore plus envie de la faire !
Ce qui fait un grand avocat c’est surtout le fond ! Ce qu’il va dire, les mots qu’il utilise, c’est la pensée, c’est son engagement, c’est le regard qu’il porte sur les affaires qu’il plaide, c’est la façon dont il va éclairer les faits d’une façon différente. C’est lorsqu’il donne à penser et à réfléchir.
J’aurais bien aimé faire celle de Badinter dans l’affaire Patrick Henry. Il y a aussi des plaidoiries qui malheureusement n’existent pas comme pour le «mediator» qui pourrait être très intéressante. Parfois, l’affaire peut être importante mais cela ne veut pas dire que la plaidoirie va être bonne. Il en est des plaidoiries comme des «bonnes» ou des «mauvaises» pièces.
Continuer à monter sur scène ! Mais, ce que j’aimerais vivre, c’est retourner vers des classiques. J’ai commencé par là avec la Comédie française pendant 7 ans. Depuis, je ne joue que des pièces contemporaines mais c’était mon souhait parce que j’estime que j’appartiens à mon siècle et qu’il est normal que je joue des auteurs de mon temps. En revanche, maintenant j’aimerais bien revenir une fois… ou deux à des classiques ! Molière ou Shakespeare particulièrement !
J’ai déjà joué à l’Opéra de Vichy, un lieu magnifique que l’on ne peut pas oublier. L’inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO serait formidable pour la ville, une reconnaissance à sa hauteur.