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Rencontre : Christophe Mirambeau

Publié le 09/12/2022

Rencontre : Christophe Mirambeau

L'Opéra de Vichy propose pour le 31 décembre la comédie musicale "Normandie". Entretien avec Chistophe Mirambeau, metteur en scène. 

Vous avez essentiellement fait des études liées à la musique, comment en êtes-vous venu à la mise en scène ?

J’ai toujours voulu faire de la mise en scène depuis l’âge de 15 ans. Je voulais travailler dans le théâtre musical et c’était mon parcours naturel depuis la 6e. J’ai suivi des classes à horaires aménagés. Mes parents avaient l’espoir que je devienne professeur de musique pour faire perdurer la tradition familiale.

 

Vous rêviez de recréer « Normandie » depuis un certain temps, pourquoi faire revivre cette opérette ?

C’est une pièce que je ne connaissais que par les partitions. Cette opérette fait partie du répertoire rare et c’est ce que j’affectionne. Je me suis spécialisé dans ce domaine, car je n’acceptais pas que l’on me dise quoi penser. J’ai naturellement toujours voulu comprendre pourquoi les répertoires d’entre deux- guerres avaient si mauvaise presse.

J’ai eu la possibilité de jouer « Normandie » au piano-chant et j’ai trouvé les chansons absolument formidables. Étant moi-même un fan inconditionnel de Ray Ventura et son orchestre, j’étais convaincu qu’il fallait monter ce spectacle. Cependant, le matériel d’orchestre était réputé perdu.

J’ai eu la chance de rencontrer le fils de Paul Misraki (camarade de Ray Ventura et compositeur de la célèbre « Ça vaut mieux que d'attraper la scarlatine » ). J’étais tellement interloqué qu’après l’avoir salué, je lui ai directement demandé « Et le matériel de Normandie » ? Ce à quoi il répondit « Je l’ai ! ». Dès lors, j’ai pu réaliser mon rêve : monter Normandie ! Les Frivolités Parisiennes, compagnie dans laquelle j’œuvre en tant que conseiller artistique, m’a tout de suite fait confiance.

 

On remarque, en fond de scène, de grandes lettres blanches qui forment le mot NORMANDIE. Ces lettres seront déplacées tout au long du spectacle pour former d’autres mots. Pourquoi un tel choix de décor ?

Il faut savoir que cette pièce a été créée en 1936 et a été jouée environ 4 mois dans sa forme originale. Il n’y avait plus eu de reprises d’une telle envergure. Le Normandie était à l’époque un fleuron du luxe et de la technologie française. Toute la France était fière de détenir un tel bateau. Aussi, la production avait fait le choix de décors que l’on pourrait qualifier de publicitaire, car il présentait tous les espaces de ce bâtiment au public parisien qui n’avait pas forcément les moyens de faire une croisière.

De mon côté, je ne voulais pas remonter cet ouvrage de manière réaliste parce que les décors qui sont dans la pièce comme indiqués dans le livret ne sont que des écrins pour jouer des scènes de comédie, que l’on peut jouer n’importe où et qui étaient là par rapport à ce désir publicitaire. Je ne voyais pas l’intérêt de faire une superproduction et dépenser des sommes importantes pour reconstituer les espaces du Normandie.

Je voulais plutôt faire appel à l’imagination du public avec les projections des animations vidéo de Casilda Desazars et Bernard Martinez au lointain et avec l’orchestre en scène dont les rambardes rappellent les bastingages de bateau. Enfin, ces lettres géantes me permettent de pointer des situations par des mots que je peux faire uniquement à partir du mot Normandie. C’est aussi le plaisir de la virtuosité intellectuelle, qui marche avec le jeu et la fantaisie que cela peut amener.

 

L’orchestre est sur scène, c’est un choix peu courant…

C’est un désir personnel, je voulais avoir mon orchestre de marins sur scène, pour jouer avec eux. Ce ne sont pas de simples accompagnants, je voulais les valoriser car ce sont de merveilleux musiciens qui se prêtent volontiers au jeu de la comédie. Cela permet également de présenter le spectacle dans des salles qui n’ont pas de fosses d’orchestre.

 

Vous avez déjà travaillé avec succès avec les Frivolités Parisiennes, une affection particulière pour cette compagnie ?

C’est une compagnie qui est consacrée à l’orchestre, dont le répertoire à l’origine tend vers l’opéra-comique. Aujourd’hui, les Frivolités Parisiennes s’intéressent à tous les genres du spectacle musical de divertissement et de préférence dans les répertoires peu joués, inconnus ou à recréer et représenter (car oubliés ou effacés de l’histoire du théâtre vivant). On apporte notre expertise sur le style, la musicalité, sur ce répertoire très spécifique, qui embrasse maintenant au moins 50 ans du théâtre depuis le début du XXe siècle.

 

Connaissez-vous la ville de Vichy ?

J’ai eu la chance de jouer à l’Opéra de Vichy à la fin des années 1980. Cet opéra est un endroit éblouissant, c’est un bonheur absolu de jouer dans cette salle. Je reviens de temps à autre à Vichy et je me sens à chaque fois délicieusement hors du temps, grâce au charme de la ville. Avec mes yeux d’historien, j’apprécie beaucoup l’histoire de Vichy, bonne ou moins bonne, car j’ai notamment travaillé sur la période de l’occupation. J’ai coécrit « l’Impératrice » avec Édouard Signolet. J’ai aussi une tendresse pour le second empire. Je reviendrai jouer avec plaisir. Vichy est mon bonbon, ma cerise sur le gâteau pour clôturer cette année en beauté !

 

« Normandie » , samedi 31 décembre à 20h, à l’Opéra de Vichy. 

Crédit image : Casilda Desazars