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Le «coeur d'agglo» en bulles par Muriel Douru

Publié le 26/02/2021

Le «coeur d'agglo» en bulles par Muriel Douru

Entretien réalisé en novembre 2020

En ce début d’année, la Ville de Vichy accueille, en résidence, l’auteure et illustratrice Muriel Douru. Engagée pour des causes sociales, elle a, notamment, écrit des ouvrages pour la jeunesse ainsi que des BD sur des sujets forts de la société d’aujourd’hui. Cette résidence, d’une durée de trois mois a pour objectif la réalisation d’une création littéraire et artistique sur le quartier «Cœur d’agglo». Entretien.

Vous êtes auteure-illustratrice ? Quels sont les sujets que vous abordez ?

Au départ, je suis illustratrice professionnelle, et, si j'ai pris la plume, c'est pour témoigner de ce que je voyais autour de moi, et, même si je fais de la fiction, c'est toujours pour interroger le réel. J'ai commencé en écrivant, en 2003, un livre pour enfants sur l'homoparentalité. À l'époque, le sujet était complètement «invisibilisé» alors que mes amies lesbiennes commençaient à avoir des enfants. Ensuite, j'ai continué dans ce sens car j'ai senti une attente, un besoin de celles et ceux qui ne sont jamais représentés dans les médias. J'ai publié des livres pour enfants pour parler de ces familles LGBT, un récit autobiographique pour raconter mon parcours de PMA à l'étranger qui a permis la naissance de ma fille et, depuis 2016, j'écris et illustre des romans graphiques sur les thèmes qui me sont chers : écologie, protection animale, homophobie, féminisme, etc. Le prochain, qui sortira en mars, a été réalisé avec Nicolas Hulot.

Pourquoi avoir choisi  la bande-dessinée comme support d’expression et d’où vient votre engagement ?

Mon support s'apparente davantage au «roman graphique» qu’à la «BD» : moins classique dans la forme et plus engagé sur le fond. Il mêle mes deux amours : l'illustration et l'écriture. Il permet de toucher des gens qui ne lisent pas de livres «classiques» et il intéresse davantage les jeunes. Les questions traitées questionnent notre présent, touchent davantage celles et ceux qui seront les adultes demain. Mon engagement n’est pas une attitude réfléchie. Il est normal que nous soyons toutes et tous concernés par le monde qui nous entoure et dont nous sommes responsables. Si quelque chose me semble absurde ou injuste, je le ressens très profondément et j'ai envie d'en témoigner. Je n'ai pas de problème avec la remise en question, qu'elle soit individuelle ou collective, au contraire, je la souhaite pour que nous avancions ensemble, vers une autre issue que celle qui s'annonce.

Pourquoi avoir choisi la résidence d’auteur-illustrateur à Vichy ?

J’ai découvert la ville de Vichy quand j'étais enfant mais je ne suis pas venue depuis très longtemps ! J'ai tout à découvrir ! La médiathèque Valery-Larbaud avait repéré mon travail grâce aux étudiants de la ville qui ont élu mon dernier roman graphique («Putain de vies !», un livre-enquête sur les travailleuses du sexe, réalisé en collaboration avec l'association Médecins du Monde). Une sélection faite par France Info pour la «BD d'actualité et de reportage de l'année». Ce prix des étudiants m'a fait très plaisir et je les en remercie ! Cette résidence m'a semblé correspondre à mon travail car son idée principale est de témoigner du quotidien dans le quartier «Cœur d'agglo», un quartier dit prioritaire. Or, raconter la vie des exclu(e)s est une motivation pour moi, aussi, parce que leurs vies, bien souvent étonnantes, sont inconnues du grand public.

Avez-vous des premières pistes sur l’ouvrage que vous allez préparer ici ?

Le but de la résidence est la création d'un ouvrage à dimension sociale et culturelle pour raconter la vie du quartier et, plus spécifiquement, la période pandémique exceptionnelle que nous vivons, mais tant que je n'ai pas rencontré les habitants, parlé avec les acteurs de terrain, etc., il m'est impossible de me projeter dans l'écriture. J'ai besoin de «matière» pour composer un livre. En revanche, ce dont je suis certaine, c'est que la pandémie et le confinement ne sont pas vécus de la même façon selon la classe sociale à laquelle on appartient.  Il y a des choses à dire, probablement très intéressantes, sur le sujet et ça, c'est déjà une certitude ! 


Atelier au Centre Barjavel avec Muriel DOURU